A propos du disque
Nous avons la chance en France de posséder quelques grands formats qui concourent à rendre encore plus excitante la jeune scène des musiques actuelles. L’ "exception culturelle" passerait-elle entre autre par ce jazz en grand ensemble ? De ces tailles XL parcourues par divers réseaux de musiciens complices, se dégagent un sens jouissif de la tribu, un esprit de famille affirmé.
Musiciens trentenaires pour la plupart, mais au parcours déjà bien rempli, le Gros Cube du saxophoniste Alban Darche constitue un de ces exemples de collectif apprécié des "amateurs éclairés", de la presse dite "spécialisée" mais quasi-inconnu du public. Il débarque pourtant avec son premier album qu’il convient d’accueillir comme il se doit en soulignant le travail remarquable de labels indépendants comme Yolk (cinq ans cette année) qui regroupe la fine fleur des musiciens de la région Centre et Pays de Loire. Plus qu’un label avec une véritable démarche de producteur, Yolk a été conçu par des musiciens et pour des musiciens, pour le son et le travail de groupe. Comme le souligne le contrebassiste Sébastien Boisseau, cofondateur du label, “Yolk c’est un peu un label équitable, avec de la musique qui va directement du petit producteur au consommateur à un prix très raisonnable."
Belle cylindrée et chaloupée, cette machine fait la part belle aux souffleurs : une section complète qui se décline en cinq saxophonistes dont deux clarinettistes, trois trompettistes joueurs de bugle et deux trombonistes sur un total de quatorze musiciens dont une seule fille, l’excellente Airelle Besson (vive la parité !) Orchestrateur efficace de cet ensemble polymorphe, Alban Darche arrive à combiner les voix, à faire swinguer le tout "le hold up de la saltimbanque", à tirer le meilleur de ses solistes, Jean Louis Pommier sur "Krabut ", Sylvain Rifflet sur "Cube", Matthieu Donarier sur "Tango 2", Geoffroy Tamisier sur "Suite arabe". Ne passons pas non plus sous silence le travail en tous points remarquable de la section rythmique Christophe Lavergne aussi à l’aise que discrètement efficace, le formidable Sébastien Boisseau pilier du groove, et Gilles Coronado, guitariste imprévisible et donc délicieux, sans oublier l’agitateur poétique et "sonique" Arnaud Roulin qui vient animer ces titres souvent malicieux, énigmatiques, et nous balader dans l’imaginaire du collectif.
Le Gros Cube mérite d’être découvert, donc programmé… Avis aux responsables !
Sophie Chambon © Sefronia